Hier notre cerveau était notre allié, il nous a fait triompher de la nature. Aujourd'hui il est en passe de devenir notre pire ennemi.
Hier notre cerveau était notre allié, il nous a fait triompher de la nature. Aujourd'hui il est en passe de devenir notre pire ennemi.
Sébastien Bohler vient de publier "Le bug humain, Pourquoi notre cerveau nous pousse à détruire la planète et comment l’en empêcher". Il apporte un éclairage nouveau et original sur la question du devenir contemporain. Le premier coupable à incriminer n'est pas l'avidité des hommes mais bien la constitution même de notre cerveau.
Peut-on lutter contre soi-même ? Et si notre cerveau était devenu notre pire ennemi ?
Plus qu'un moment critique nous vivons une véritable tragédie. Surpopulation, surpoids, surproduction, surconsommation, surchauffe, surendettement, nous avons basculé dans l'ère de tous les superlatifs qui mène l'humanité tout droit à sa perte ... Nous voyons le mur se rapprocher et nous ne faisons rien.La conscience de ce qui nous attend ne semble avoir aucun effet sur le cours des événements. Pourquoi ?
Pour Sébastien Bohler, le premier coupable à incriminer n'est pas l'avidité des hommes ou leur supposée méchanceté mais bien, de manière plus banalement physiologique, la constitution même de notre cerveau lui-même.
Pour Sébastien Bohler, le premier coupable à incriminer n'est pas l'avidité des hommes ou leur supposée méchanceté mais bien, de manière plus banalement physiologique, la constitution même de notre cerveau lui-même.
Au cœur de notre cerveau, un petit organe appelé striatum régit depuis l'apparition de l'espèce nos comportements. Il a habitué le cerveau humain à poursuivre 5 objectifs qui ont pour but la survie de l'espèce : manger, se reproduire, acquérir du pouvoir, étendre son territoire, s'imposer face à autrui.
Le problème est que le striatum est aux commandes d'un cerveau toujours plus performant (l'homme s'est bien imposé comme le mammifère dominant de la planète) et réclame toujours plus de récompenses pour son action. Tel un drogué, il ne peut discipliner sa tendance à l'excès. À aucun moment, il ne cherche à se limiter.
Le problème est que le striatum est aux commandes d'un cerveau toujours plus performant (l'homme s'est bien imposé comme le mammifère dominant de la planète) et réclame toujours plus de récompenses pour son action. Tel un drogué, il ne peut discipliner sa tendance à l'excès. À aucun moment, il ne cherche à se limiter.
By cerveauetpsycho
Dans son dernier livre – Le Bug humain, éditions Robert Laffont – notre rédacteur en chef Sébastien Bohler explique que notre cerveau poursuit des objectifs incompatibles avec la sauvegarde de la planète. Pour survivre, nous allons être obligés de remodeler nos neurones.
InfoEn+: Top 10 Country Population Ranking History (1950-2050)... Année après année, les températures montent, les océans aussi, des milliers d’hectares de terres se transforment en désert et des millions de personnes se préparent à quitter leurs foyers pour migrer. De tout cela, nous sommes responsables.
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Pour la première fois de son histoire, l’enjeu pour l’humanité va être de se survivre à elle-même ... Elle n’y est pas préparée. Devant ce défi suprême, elle ne répond que par des incohérences. Pourquoi, face à la catastrophe, continuons à agir comme par le passé? Qu’est-ce qui, en nous, est si dysfonctionnel?
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Ce que j’ai découvert m’a glacé. Ce cerveau (...) est en réalité un organe au comportement largement défectueux, porté à la destruction et à la domination, ne poursuivant que son intérêt propre et incapable de voir au-delà de quelques décennies.
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Une partie de notre cerveau nous (...) pousse de manière automatique, sans que nous ayons actuellement les moyens de le freiner.
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Nous sommes comme les pilotes d’un avion dont les témoins lumineux hurlent à tue-tête pour signaler un crash imminent, et qui se lanceraient: “Il nous reste deux minutes, on a encore le temps de se préparer un bon café.”
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Le cerveau humain est programmé pour poursuivre quelques objectifs essentiels, basiques, liés à sa survie à brève échéance.
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Ce système de renforcement a été si efficace qu’il s’est transmis à toutes les espèces de vertébrés. Les neurones du striatum, qui charrient de la dopamine et du plaisir en réponse à tout comportement tourné vers la survie, sont le moteur de l’action des poissons, des reptiles, les oiseaux, des mammifères et des marsupiaux.
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À aucun moment il ne lui viendrait à l’idée de se limiter. Il n’est pas fait pour cela. Il n’a jamais intégré cette donnée, cela n’a pas été spécifié dans ses plans de construction.
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Tout cela forme le carburant d’une économie de croissance qui n’a aucune raison de renoncer à son principe fondamental, car c’est ce principe qui a fait le succès de notre espèce.
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En 2016, l’Organisation mondiale de la santé livrait un rapport selon lequel on meurt plus sur Terre aujourd’hui de suralimentation que de dénutrition. Aujourd’hui, plus de 1,9 milliard d’individus de plus de 18 ans sont en surpoids. Parmi eux, plus de 650 millions sont obèses. Ces chiffres ont triplé en 40 ans et en 2030, on s’attend à ce que 38% de l’humanité soit en surpoids, et 20% obèses. Notre striatum est programmé pour cela, et nous pousse à engouffrer encore et toujours plus.
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Si nous sommes à ce point démunis devant l’abondance de nourriture, c’est parce que nous n’y avons jamais été préparés.
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une fois que l’homme a été capable de produire sa propre nourriture de façon maîtrisée et presque sans limite, ces “gènes goinfres” sont devenus nos pires ennemis.
... plus un avantage est éloigné dans le temps, moins il a de valeur pour notre cerveau.
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Quand une récompense future est annoncée, les neurones du striatum s’allument au moment de l’annonce du plaisir, en anticipation de la gratification future, comme l’ont montré les travaux de Wolfram Schultz. Mais ce qu’a en outre démontré l’équipe du neuroscientifique suisse, c’est que la force de la décharge de dopamine dépend du délai qui sépare l’annonce de la récompense de sa venue effective. Plus le délai est long, plus la réponse anticipatoire est faible. Pour cette raison liée au fonctionnement même de nos neurones dopaminergiques, il nous est difficile de trouver de l’intérêt à ce qui se situe dans un futur lointain.
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Les bénéfices du “tout, tout de suite” nous ont aidés à survivre sur des échelles de temps que nous avons du mal à imaginer. Il s’agit d’ères géologiques, s’étendant sur des dizaines de millions d’années. Des durées qui façonnent durablement les structures de base d’un cerveau humain. Cette période de temps a créé de solides connexions entre les neurones, au cœur du disque dur de nos systèmes nerveux. Et pendant des dizaines de millions d’années, les animaux possédant un striatum configuré pour préférer les récompenses immédiates ont réussi à se maintenir en vie, et les autres ont été purement et simplement éliminés de la course de l’évolution. Par une conséquence mathématique, tous les vertébrés que nous observons aujourd’hui ont hérité de ce moteur d’impulsivité et, malheureusement, de cette cécité face au futur.
"ça en fait des striatums o.O'"
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8 MILLIARDS D’IMPATIENTS
Nous vivons aujourd’hui dans un monde où les délais d’attente pour obtenir quoi que ce soit, qu’il s’agisse de nourriture, d’alcool, de tabac, de sexe, de statut ou même d’argent (à quoi servent les crédits?) sont raccourcis au maximum. Nous sommes devenus impatients, nous avons tout cédé à nos striatums, et nous ne pouvons plus mettre entre parenthèses le confort immédiat au profit d’un projet futur. Nous aimons toujours faire des projets, mais si c’est au prix de sacrifices réels dans l’instant, nous ne possédons plus la connexion physiologique nécessaire pour le faire.
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Équipés de cerveaux incontinents, comment pouvons-nous réfléchir à l’avenir de notre monde, à la survie de notre écosystème à long terme et à la préservation de la planète ? Quand des avantages instantanés qui flattent notre striatum en ciblant ses grands besoins primaires (...) nous sont proposés ici et maintenant, qu’est-ce qui pourrait nous empêcher de les saisir sans attendre?
Au terme de ce processus, l’être humain est devenu un danger mortel pour lui-même. Son programme neuronal profond continue aveuglément de poursuivre des buts qui ont été payants pendant une grande partie de son évolution, mais qui ne sont plus du tout adaptés à l’époque où il s’est projeté. Au regard de sa situation actuelle dans un monde globalisé, l’humain est inadapté. Le drame de sa condition réside dans le fait que ses moyens techniques, tout en s’accroissant au fil des siècles, ont toujours été mis exclusivement au service des objectifs prioritaires de son striatum. L’immense cortex d’Homo sapiens, en lui offrant un pouvoir toujours plus étendu, a mis ce pouvoir au service d’un nain ivre de pouvoir, de sexe, de nourriture, de paresse et d’ego. L’enfant surarmé en nous n’a aujourd’hui plus de limites. La grande question qui se pose à nous maintenant est: l’humanité peutelle sérieusement se définir d’autres buts que celles de son striatum?
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Le striatum peut apprendre à aimer bien d’autres choses, et que nos buts peuvent être redéfinis par un facteur déterminant qui est la norme sociale. Le discours parental, puis celui de l’école, des médias et de la politique, en valorisant socialement des comportements comme l’altruisme, la modération, le respect de l’environnement, peut amener nos striatums à voir les choses sous un angle nouveau
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CROISSANCE MENTALE VS CROISSANCE MATÉRIELLE
... rajouter un peu de conscience dans nos actes du quotidien (...) est une façon de duper notre striatum.
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Développer notre conscience de ce qui nous entoure n’est pas un but abstrait et irréalisable. Il existe des techniques éprouvées pour cela, qui sont globalement regroupées dans le courant des techniques de méditation de pleine conscience. La méditation de pleine conscience est une discipline du corps et de l’esprit, dépourvue de toute connotation religieuse dans sa version laïque (ou associée au bouddhisme dans ses versions traditionnelles), qui consiste à développer la maîtrise de son attention dans un premier temps, pour ensuite affiner sa capacité de prendre conscience de tout ce qui se passe autour de nous et en nous.
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augmenter notre niveau de conscience global. Nous immuniser, par le pouvoir de notre cortex, contre l’appel du “tout, tout de suite”. Récupérer le pouvoir de la réflexion au long cours sur notre avenir. De telles pratiques nous donnent plus de liberté pour prendre en main notre destinée.
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il s’agira donc pour chacun de développer le champ de ses ressources mentales et donc de ses expériences qualitatives. À la clé, une limitation de la consommation de biens matériels, sans qu’il en résulte automatiquement un sentiment de déchéance ou de frustration. Peut-être même le contraire…»
Extrait du livre de Sébastien Bohler, "Le bug humain, Pourquoi notre cerveau nous pousse à détruire la planète et comment l’en empêcher" aux éditions Robert Laffont.
La Terre est aujourd’hui peuplée de presque huit milliards d’êtres humains. Ce chiffre peut paraître gigantesque, mais son augmentation est plus impressionnante encore. Il y a à peine deux siècles, nous n’étions guère plus d’un milliard sur la planète. La hausse de ces cinquante dernières années a été la plus forte de toute l’histoire. Chaque année, quelque 90 millions d’individus viennent grossir les rangs de l’humanité1. Si, depuis une planète lointaine, des extraterrestres nous observaient, ils penseraient que cette espèce, Homo sapiens, a brillamment réussi. Nous croissons, nous nous multiplions. Nous maîtrisons l’atome, l’électron, l’informatique, le moteur à explosion et l’ingénierie génétique. Nous pouvons sauver des personnes de la mort, grâce à des techniques de réanimation et de chirurgie encore impensables il y a un siècle. Et nous réussissons à mettre en communication ces milliards de personnes les unes avec les autres, ce qui aurait été considéré jadis comme de la magie.
Ce succès, nous le devons au développement d’un organe hors du commun, capable d’abstraction et de planification. Un organe apte à construire des machines, à communiquer verbalement et par écrit, à coopérer afin d’associer des groupes d’hommes et de femmes autour de projets complexes. Cet organe, notre cerveau, est constitué d’environ 100 milliards de neurones, et d’autant de cellules gliales qui les entourent, les nourrissent et les protègent. Il produit la conscience, une capacité de réfléchir à soi-même et au sens qu’on souhaite donner à sa vie. Il est la plus incroyable merveille de technologie qui ait jamais vu le jour. Il a mis des centaines de milliers d’années à se perfectionner, sous-tendu par des gènes soigneusement réglés pour répondre à tous les défis changeants de son environnement. Nous lui devons tout. Il est notre passeport pour la vie, il a triomphé de prédateurs cent fois plus puissants que lui, et a vaincu des ennemis plus redoutables encore, microscopiques, qui s’attaquaient à son système immunitaire depuis des temps immémoriaux, décimant les populations.
Mais ce cerveau a une face sombre. Un principe destructeur qui a fait son succès contre les prédateurs pendant des millions d’années, mais qui menace à présent de le tuer, lui et ses huit milliards de semblables. Plus il réussit, plus il se rapproche de sa propre perte. Il a signé un pacte avec le diable, il y a fort longtemps. Ce pacte lui promettait la puissance, la domination et la maîtrise de la nature dans un premier temps, mais la ruine et la destruction dans un second. Il a réalisé la première partie de ce contrat. Aujourd’hui, il est temps de payer sa dette.
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FICHE
Sébastien Bohler est un journaliste, chroniqueur, conférencier et écrivain français. Actuellement rédacteur en chef de la revue Cerveau & Psycho, il intervient dans les domaines liés aux neurosciences et à la psychologie.
D’octobre 2004 à juillet 2007, il collabore à Arrêt sur Images, aux côtés de Daniel Schneidermann, émission hebdomadaire d’analyse et de critique des médias. Il s'intéresse à leur impact sur le psychisme et le cerveau.
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Arthur
Il intervient dans différents médias comme la radio ou la télévision:
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Conférencier,
Aussi auteur, entre autre, de deux romans de fictions
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Sources > wikipedia.org / atlantico.fr / google.fr